DIMANCHE, 32ème SEMAINE DU TEMPS ORDINAIRE-ANNÉE B-11/11/18-Mc 12, 38-44

Homélie du frère Denis Bissuel, op

La scène se passe dans le Temple de Jérusalem, qui est le lieu par excellence, le signe de la présence de Dieu à son peuple, c’est là que le peuple se rassemble, et se tourne vers son Seigneur en lui présentant offrandes, prières et sacrifices. Le Temple est grand et beau, il suscite l’admiration et le respect de tout le peuple et des disciples en particulier. Il y a foule, et Jésus lui aussi est, comme naturellement, là, il regarde la manière dont se comportent les gens dans ce lieu révélateur et sacré, et il enseigne.

Et dans son enseignement il disait : Méfiez-vous des scribes.Une telle mise en garde est rare dans la bouche de Jésus qui en appelle habituellement plutôt à la confiance qu’à la méfiance. Jésus met en garde contre les scribes, du moins contre certains d’entre eux, ceux qui aiment se faire bien voir, déambulent en vêtements d’apparat, ils aiment être salués en public, occuper les meilleures places dans les synagogues et dans les dîners. Ils font même de longues prières. Ce sont des gens instruits, les scribes ont fait des études, ils connaissent bien la Bible et la Loi, ils ont fait de la théologie. Ils sont reconnus et respectés

Mais, dit Jésus, méfiez-vous, ce sont des rapaces, des prédateurs ; sous leurs belles apparences ils peuvent inspirer la confiance mais ils dévorent les biens des personnes les plus faibles et les plus fragiles, ici ce sont les veuves, là leurs victimes pourraient bien être les enfants ou les personnes âgées, bref, les plus vulnérables. Ces scribes-là jouent une comédie dramatique, ils corrompent l’acte religieux de la prière, salissent le Temple, ils trahissent la Parole de Dieu, ils font des ravages. Ils se condamnent eux-mêmes, dit Jésus, et s’excluent du salut que Dieu veut leur offrir. Par sa parole et sa présence en ce lieu saint, Jésus dit et fait la vérité, il dévoile les méfaits que les apparences peuvent si bien camoufler.

Et l’évangile poursuit : il y a quelque part dans la Maison de Dieu un trésor,  un endroit où chacun peut et doit déposer de l’argent pour participer à l’entretien des lieux, des préposés aux différents services du culte, aux offrandes et aux sacrifices. Là encore les attitudes diffèrent et sont révélatrices de notre manière d’être sous le regard de Dieu et de nos frères, elles révèlent le sens et  la portée que peuvent avoir nos paroles et nos actes.

Jésus regarde : il y a beaucoup de gens qui donnent beaucoup d’argent, ce qui est sans doute bien utile car le Temple de Jérusalem dans sa magnificence coûte cher. Il y a quelqu’un, une personne, pauvre et veuve, qui sans doute occupe habituellement les dernières places ; elle met peu d’argent dans le tronc, deux petites pièces de monnaie. Et Jésus, qui est assis en face du tronc, appelle ses disciples, et   va commenter, interpréter, ce qu’on pourrait qualifier d’humble geste. En appuyant comme il le fait parfois ce qu’il veut dire et faire bien entendre : Amen, en Vérité, je vous le dis, cette pauvre veuve a mis dans le Trésor plus que tous les autres. Tous ont pris sur leur superflu, elle, elle a pris sur son indigence, elle a mis tout ce dont elle a besoin pour vivre.

Elle a fait comme le fit déjà au temps du prophète Elie une autre veuve, de Sarepta, quand le prophète la sollicita pour donner le peu qu’elle avait encore pour manger elle et son fils. Deux veuves : l’une accepte de partager sa misère avec un étranger alors qu’elle se trouve aux portes de la mort. L’autre donne pour le Temple les quelques pièces dont elle avait besoin pour vivre. Il fallait oser la confiance, prendre le risque de se dépouiller encore, croire en la Parole prophétique ; pour ces deux femmes, Dieu a parlé, elles remettent leur vie entre ses mains.

Geste de confiance absolue, qui passe inaperçu. Et geste fou s’il en est de la pauvre veuve qui met tout pour le Temple quand on sait que Jésus, à peine sorti, va en annoncer la ruine à ses disciples interloqués. Tout donner pour rien, pour un magnifique bâtiment dont il ne restera pas pierre sur pierre !

Ce qui reste et restera c’est le geste, le don pour la Maison de Dieu, la fidélité à la Parole de Dieu, à l’Evangile, sans plus aucune grandeur tangible ni apparence glorieuse. Le cœur est peut-être là, le Trésor pour lequel il faut donner et se donner. Les deux piécettes ne seront pas perdues, elles vont entrer dans le sanctuaire fondé sur la pierre d’angle rejetée par les bâtisseurs, sur le Christ lui-même.

A la veuve du Temple on ne peut plus rien enlever, elle a tout donné. Personne ne pourra plus dévorer ses biens en prétextant de longues prières. Le don total et absurde de tout ce qu’elle avait pour vivre est comme une parabole de la mort de Jésus. Jésus lui-même se dépouille de tous ses biens, il ne retient rien pour lui, pas même le rang qui l’égalait à Dieu, il donne sa vie, le bien le plus précieux. Il paraîtra pauvre et dérisoire, mourant sur la croix entre deux brigands, dans une apparence de fon du monde. C’est de cette mort absurde et scandaleuse que surgira la vie véritable.

Entrant dans sa passion Jésus dira : Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.Là est bien le trésor, dans cet amour donné, reçu, partagé avec tous dans la confiance et dans la foi. L’amour, la charité, unit les pierres vivantes du Temple nouveau. Il ne passera jamais

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