
Mystique néoplatonicienne
L’oeuvre et la pensée de Greco sont marquées non seulement par le néoplatonisme des théoriciens de la renaissance italienne, mais aussi par l’expression éminemment dionysienne des mystiques espagnols. C’est à l’école des grands maîtres de la peinture vénitienne et romaine que Greco a découvert l’oeuvre et la pensée du florentin Marsile Ficin (1433-1499) et de son disciple Pic de la Mirandole (1463-1494). Traducteur des oeuvres de Platon, Plotin, Denys l’Aréopagite et de la plupart des néoplatoniciens, Marsile Ficin prône un art dont l’expression et les normes sont empruntées à l’Antiquité grecque et latine. De même, c’est dans le contexte de l’effervescence mystique du Siècle d’Or espagnol que Greco se familiarise avec l’oeuvre de Denys l’Aréopagite. Publiés et diffusés du vivant de Greco, les ouvrages de Jean d’Avila, de Louis de Grenade et de Barthélemy des Martyrs représentent une parfaite expression du mystère dionysien au service de l’oraison mentale dite commune. A l’origine de ces deux expressions artistique et spirituelle il y a une seule et même source d’inspiration. Cette source d’origine ramène la forme et l’esprit à cette unité où il serait bien hasardeux de distinguer ce qui revient au travail du peintre d’une part et à l’homme de prière d’autre part. En effet, quand la flamme s’impose en figure, il est malaisé de distinguer l’ardeur qui guide le pinceau de la flamme qui anime l’être profond. L’une et l’autre renvoient en figure à un seul et unique principe créateur.