Homélie du frère Rémy Valléjo – samedi 21 mars
Selon Maitre Eckhart, dominicain du XIVe siècle, c’est mon humilité qui donne à Dieu sa divinité.
Cette parole a de quoi nous désarçonner,
et pourtant elle pourrait bien éclairer l’Évangile de ce jour.
En effet, c’est ma qualité d’ajustement qui révèle « le seul juste » qui soit : Dieu Lui-même.
De même que « Dieu seul est bon » selon la parole que Jésus adresse au jeune homme riche, « Dieu seul est juste » selon la parabole du pharisien et du publicain.
Depuis l’aube des temps,
il n’y a pas un seul « homme juste ».
De Noé à Abraham,
il n’y a guère que des hommes qui s’ajustent à la volonté divine, ou mieux encore que Dieu, « le seul juste » ajuste à sa propre volonté.
Saint
Joseph, l’époux de la Vierge Marie, dont il est dit qu’il « est un
homme juste », n’est pas un homme juste en soi, mais un homme qui, dans
son désir d’accomplir un acte juste, s’ajuste à la volonté divine, et
mieux encore est ajusté par Dieu Lui-même
Selon la parabole de ce jour,
le pharisien et le publicain manifestent qu’ils ne sont ni l’un ni l’autre, parfaitement ajustés.
Arrogant,
et regardant de haut son prochain,
le pharisien ajuste Dieu à sa propre justice.
Doléant,
et trop fixé sur sa propre injustice,
le publicain ne lève pas les yeux et ne peut nullement envisager la justice de Dieu.
Seul est foncièrement ajusté, l’homme qui, dans sa qualité d’ajustement, se présente tel qu’il est, osant lever son regard vers Celui qui accueille, avec justice et miséricorde, les maladresses de tout homme.
Or c’est précisément dans cet échange de regard que Dieu, révélant ce qu’il est, offre ce qu’il est.
C’est donc dans sa qualité d’ajustement que l’homme découvre Dieu qui tel qu’il est : « le seul juste ».
Dieu, « le seul juste », profondément désireux de partager sa justice et sa miséricorde pour que tout homme devienne en Lui seul, juste comme Lui-même est juste.