Assomption de la Vierge Marie


Homélie du frère Emmanuel Dumond, op.
Aujourd’hui, c’est le 15 août.
Nous fêtons la naissance de Napoléon 1er.
Enfin, non, ça, c’est trop politique.
Aujourd’hui, nous fêtons surtout Marie, la mère de Dieu. Marie ce n’est pas de la politique, quoi que…
Nous fêtons Marie et c’est comme ça depuis 1600 ans. Nous fêtons celle qui s’est ouverte à l’Esprit, qui a accueillie le Verbe de Dieu en elle, cet Esprit qui transforme, qui donne la vie et qui resuscite.
Alors en cette eucharistie, demandons pardon pour toutes les fois où nous n’avons pas su nous ouvrir à l’Esprit.

L’Assomption, mythe ou réalité ?
Est-ce un dogme abstrait et inutile, proclamé de manière autoritaire par Pie XII, ou est-ce une réalité qui change nos vies?
Pour les enfants, je rappelle que la fête de l’Assomption, c’est la fête de la mort de Marie, ou plutôt la fête de sa naissance à la vie éternelle. Et depuis qu’on a réalisé que si Marie avait accueillie Dieu en elle, elle devait être exceptionnelle, elle ne devait pas être touchée par le mal et par la maladie, depuis qu’on s’est dit ça, on en a tiré une conclusion : c’est que son corps ne pouvait pas être laissé à la décomposition, son corps avait été enlevé au Ciel par le Christ lui-même.
Autrement dit, l’Assomption, c’est la fête de la résurrection du corps. Comme Pâques, sauf que à Pâques, c’est le Christ, pleinement Dieu et pleinement homme qui resuscite, et qu’à l’Assomption, c’est une femme, pleinement homme qui monte au ciel avec son corps.
C’est pour ça que la liturgie a choisie ce texte de la 1ere lettre aux corinthiens, qui proclame la toute puissance du Christ sur la mort.
Donc l’Assomption, ça nous touche parce que la résurrection de notre corps, ça nous touche.
La résurrection, c’est bien, ça donne de l’espérance. Mais, nous on veut espérer pour maintenant. On veut de la joie, maintenant.
Justement, en cette fête de Marie, nous lisons la prière du Magnificat. Cet hymne à la joie que Marie partage avec sa cousine, tellement elle est heureuse de sa grossesse.
Mon âme exalte le Seigneur. C’est beau. Vous savez ce que ça veut dire ? Moi j’ai jamais compris. Exalte, en grec c’est mégaluo et en latin c’est magnificat: en gros, c’est faire grand. Mon âme est faite grande. En Dieu, je peux être mégalo.
Exulte non plus j’ai pas compris, le mot grec est lié au mot “décorer”: Dieu me remplit de Joie et me décore de l’intérieur.
La vie chrétienne, c’est bien ça, c’est être grandi et décoré par l’amour de Dieu, être grandi et décoré par l’Esprit que nous accueillions.
La joie qui nous habite et la résurrection des corps sont liées, voilà ce que nous dit l’Assomption. La lettre aux Romains le dit aussi autrement :
« Celui qui a ressuscité le Christ Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous. » (Rm 8,11).
En fêtant Marie, nous nous redisons qu’elle est modèle de vie chrétienne. Que nous aussi, nous cherchons à accueillir l’Esprit, pour être grandi et décoré par le Seigneur, pour recevoir sa vie éternelle, jusque dans nos corps mortels.
Mais Marie, ce n’est pas un modèle de passivité.
La lecture de l’Apocalypse nous rappelle que recevoir le fils de Dieu, c’est un combat.
Je vous conseille vivement de relire intégralement le chapitre 12 de l’Apocalypse.
La vierge couronnée, elle n’est pas là dans son canapé. Elle est en plein combat. Le texte a zappé le combat de Michel contre le dragon. C’est Michel qui gagne, le dragon est expulsé du ciel. Mais il continue à poursuivre la femme. Et celle-ci court. Et le dragon veut la noyer dans un fleuve, mais la Terre, notre alliée, s’ouvre pour absorber le fleuve… C’est une vraie aventure, parce que la vie spirituelle, la vie avec Dieu, c’est une vraie aventure.
Et ça, c’est très politique.
D’ailleurs, pendant 150 ans, de Louis XIII à la Révolution, le 15 août a été fête nationale de la France, cela a été une fête politique.
Il y a un autre 15 août politico religieux, c’est le 15 août 1942. En pleine guerre, un jésuite et un dominicain, les pères Doncoeur et Forrestier organisent un pèlerinage de jeunes au Puy en Velay, 10000 scouts de France suivis de plusieurs milliers de jeunes de la défunte Action Catholique de la Jeunesse Française avec d’autres jeunes cathos font un pèlerinage à Notre Dame de Montjoie. En 42, on n’est pas sûr de gagner la guerre, loin de là. On fait se pèlerinage pour demander la libération des prisonniers de guerre, pour demander pardon, et pour montrer que la jeunesse est encore pleine d’espérance. Ce pèlerinage marque beaucoup les esprits de l’époque. Au sens étroit du terme politique, le pèlerinage est ambiguë et lié à Vichy. Mais au sens large, il redonne l’espoir à des milliers de jeunes qui subiront les épreuves de la guerre : le STO pour certains, la résistance pour d’autre. Oui, le 15 août, la Vierge Marie, c’est politique parce que l’espérance de suivre Marie ça nourrit l’espérance et l’espérance, c’est politique.
D’ailleurs, lorsque en nov. 1950 Pie XII proclame le dogme de l’Assomption, après des années de pétitions du peuple et des évêques, c’est encore un geste politique : Les épreuves de la guerre ne sont pas cicatrisées. On est en pleine guerre froide contre l’URSS. L’Europe a besoin d’espérance.
Et peut être que c’est cette espérance qui motive 3 catholiques : Monet, Adenauer et Gasperi, à fonder, 6 mois plus tard, la Communauté Economique du Charbon et de l’Acier, qui deviendra l’Union Européenne, au drapeau couronné de 12 étoiles.
Alors, frères et sœurs, suivons Marie, laissons nous habiter par l’Esprit, défendons le bien avec espérance.

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