Homélie du frère Emmanuel Dumont – 8e Dimanche du temps ordinaire 2 mars 2025

   Le temps ordinaire, de la victoire

Aujourd’hui, c’est le 8e dimanche du temps ordinaire. Voilà qui est très commun. Personnellement, il s’agit de mon 2 000e dimanche, ma 2 000e messe dominicale ; faites le calcul pour vous-même : tout ça est très ordinaire. L’ordinaire, c’est ce qui se répète, sans surprise, de manière ordonnée, comme les motifs d’une tapisserie ou un mur de brique.

Et pourtant à chaque messe, nous célébrons l’Eucharistie, nous rendons grâce à Dieu pour un évènement qui a perça la tapisserie, un évènement qui a percé le mur de la mort.

Chaque dimanche, comme le dit saint Paul : nous rendons grâce à Dieu qui nous donne la victoire.

Depuis un mois, nous lisons le chapitre 15 de la première lettre aux Corinthiens en seconde lecture, ce chapitre est comme un manifeste sur la Résurrection. On a commencé par proclamé la résurrection du Christ, elle qui nous donne l’espérance de la résurrection, Si le Christ n’est pas ressuscité, notre prédication et notre foi est sans valeur, c’est ce que nous disions il y a 15 jours. La semaine dernière, nous avions un extrait sur l’être spirituel que nous sommes. La lettre se poursuit en nous donnant des éléments pour nous représenter notre résurrection, à la fin des temps. Quand la trompette sonnera, les corps ressusciteront, en ayant revêtu l’immortalité ! Alors, on pourra clamer : Ô mort, où est ta victoire.

Oui, tous les dimanches, c’est le 11 novembre ou le 8 mai, tous les dimanches, c’est la fête de la Victoire passée et future. Tous les dimanches, nous pourrions chanter : Victoire, tu règneras, ô croix tu nous sauveras. Rayonne sur le monde qui cherche la vérité,
O croix source féconde d’amour et de liberté.
Ce chant que l’on chantait encore il y a quelques années, avait été composé par le père André Losay au Stalag en 1941.

   Cela ne se fait pas sans nous

Il était prêtre depuis juste trois ans, mais avant d’être ordonné, il composait déjà : il avait composé l’hymne des Cœurs vaillants, devenu depuis l’Action Catholique des Enfants : Cœur vaillant, sois fier et travaille.

C’est bien ce à quoi nous appelle saint Paul aujourd’hui : prenez une part toujours plus active à l’œuvre du Seigneur. Oui, dans le Seigneur, notre peine n’est pas perdue ! Mais de quelle peine ? de quel travail s’agit-il ?

C’est justement la question de la fin du sermon sur la plaine que nous venons de lire. Jésus vient de passer quelques temps sur la montagne, pour prier et pour appeler ses apôtres. Et redescendu, il prêche à la foule, comment vivre en chrétien, comment vivre en apôtre.

Alors, comment contribuer à la Victoire ? Quel effort de guerre avons-nous à mener ? Quel est le bon combat ?

Encore une fois, Jésus ne nous donne pas un manuel pratique ou des recettes de cuisines. Dans ce sermon qu’il fait en descendant de la montagne, il se pose en nouveau Moïse, redescendu de la montagne après avoir rencontre le Seigneur. Mais Luc ne nous présente pas Jésus édictant une nouvelle loi, comme le fait Matthieu, il nous présente Jésus le prophète. Il ne donne pas une loi extérieure, mais comme un prophète, il appelle à la conversion des cœurs.

Il a commencé par les Béatitudes paradoxales et les malédictions qui vont avec (6, 20-26). Voilà une bien étrange manière de nous donner de l’espérance. Il a continué avec des commandements impossibles : l’amour des ennemis, et la miséricorde sans limite (6, 27-38). Aimer ses ennemis, voilà qui est parfois difficile. Lorsque l’on se fait crier dessus sans raison, on a toujours du mal à aimer son ennemi. Et pourtant, c’est le cœur du sermon sur la plaine : Soyez miséricordieux, comme votre père est miséricordieux. Toujours essayer de comprendre l’autre, toujours essayer de vaincre la violence ressentie, toujours essayer de trouver une réponse efficace qui ne relève pas du rapport de force.

  Développement personnel et communautaire

Et aujourd’hui, le sermon de Jésus se termine par quelques petites histoires presque comiques (6, 39-49), avec les images de l’aveugle, de la paille, de l’arbre fruitier, du trésor du cœur, et de la maison avec ses fondations (celle-là, nous ne l’avons pas lu).

Si on part de la parabole du trésor du cœur, on peut se dire que toutes ses paraboles nous exhortent à unifier notre vie, nos actes et nos paroles autour de ce qui est le plus important, Dieu. Dieu est en notre cœur, il est la graine qui nous donne la vie, vivons en Dieu. Il est la Victoire, la victoire de l’amour, continuons l’effort de guerre, ayons des paroles aimantes, ayons des actes aimants. Est-ce que vous connaissez le trésor qui est en vous ? Est-ce que c’est ce trésor qui détermine vos choix, vos actions et vos paroles ?

Si on part de la parabole des aveugles, c’est autre chose. En Matthieu, Jésus prononce deux fois cette parabole contre les pharisiens. Ici, l’important, ce n’est pas tellement une morale individuelle, c’est plutôt une question d’éthique ecclésiale ou communautaire. Que faisons-nous du leadership qui nous est donné ? Tous, nous sommes des influenceurs et nous pouvons guider nos proches. Est-ce que nous les menons vers l’absurde et la chute, comme le font tellement d’influenceurs professionnels et d’outils technologiques d’influence ? Nous voilà tous derrière un aventurier milliardaire, prêt à tomber dans le trou où il tombe ?

Dans la perspective du trésor, plus orienté vers le développement personnel, mes fruits bons ou mauvais, c’est ce que je dis ou ce que je fais. Dans la seconde perspective des aveugles, plus communautaire, mes fruits, ce sont mes voisins, mes proches, que j’aide à être bons ou mauvais.

Jésus nous fait une petite leçon de discernement. Quand je fais un choix, je peux m’intéresser aux racines, aux causes, aux mouvements de mon cœur qui influencent mon choix. Mais je peux aussi m’intéresser aux fruits que cela porte, à ce que cela change pour les autres.

  La résurrection

Oui, prenez une part toujours plus active à l’œuvre du Seigneur,  et pour ça, faites les bons choix. Mais quand on dit « l’œuvre du Seigneur », on parle de l’œuvre dont il est le commanditaire ? celle dont il est le propriétaire ? certes, mais aussi, celle à laquelle il travaille.

Les petites histoires pratiques de Jésus qui terminent son sermon sont là pour nous aider à être miséricordieux comme notre père est miséricordieux, c’est ça son œuvre à laquelle nous participons. C’est lui le modèle, c’est lui le maitre indépassable, c’est lui qui a commencé, c’est lui qui terminera.

Dans le chapitre 15 de la première lettre aux Corinthiens, sur la résurrection, dont nous avons lu un extrait, on retrouve aussi l’image de la graine et des fruits. La graine, c’est ce qui meurt en nous, le fruit, c’est ce qui vit pour l’éternité. Frères et sœurs, cultivez des fruits d’éternité, c’est Dieu qui les fait croître.

 

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