Homélie du jeudi 17 mars – fr. Nicolas BURLE
Evangile selon saint Matthieu 18,21-35
J’ai eu la chance d’accompagner des catéchumènes à Tours pendant cinq ans.
Ce qui m’a le plus impressionné est leur désir profond d’obéir à l’évangile. De ne pas édulcorer, minimiser ou interpréter les exigences de l’évangile mais de les vivre pleinement, radicalement. De les prendre au sérieux.
Dans leurs histoires de conversions, la possibilité du pardon est évidemment toujours centrale. Je les ai tous entendus poser la même question que Pierre sans même savoir que l’apôtre les avait précédés : Combien de fois dois-je pardonner ? Jusqu’où puis-je pardonner ? Dieu peut-il tout me pardonner ?
Chaque année lors de leur retraite de préparation juste avant leur baptême à Pâques, nous lisions tous ensemble ce passage de l’évangile et nous en discutions. Comme leur regard n’est pas encore habitué ou même blasé par les paraboles, ils s’émerveillaient de la disproportion de l’amour du Seigneur qui remet les dettes. Surtout quand ils apprenaient que 60 millions de pièces d’argent représente 60 millions de journées de travail soit plus de 1600 siècles de travail… alors que l’homo sapiens n’est sur la terre que depuis 2000 siècles ! Disproportion de la générosité infinie de Dieu et de la mesquinerie de l’homme qui n’a pas pitié et qui ne remet pas la dette de 200 jours. Cet homme qui finit en confinement jusqu’à ce qu’il rembourse toute sa dette.
Me revient alors en mémoire une catéchumène qui était venue me voir après cette lecture de l’évangile. « Alors Jésus demande vraiment cela ? Pardonner à tous 70 fois 7 fois ? »
Gêné, car je ne vis pas cela, j’ai été tout de même obligé de répondre : « oui en effet, il nous demande cela. » Je la vois, pensive, s’éloigner et continuer de méditer.
Un mois plus tard, après son baptême à Pâques, je la revois. Elle rayonne de joie et de paix et me dit : « Depuis un mois, j’essaye de demander pardon à tous ceux que j’ai blessés. Je suis allé voir ma famille, j’ai appelé des amis, j’ai même écrit des lettres à ceux avec qui j’étais en froid. »
Elle continue avec la simplicité confondante de la néophyte, de la jeune pousse chrétienne : « Oui, si Jésus le demande, il faut le faire parce qu’il ne demande que des choses bonnes pour nous. »