Dire, c’est incarner

Homélie du frère Emmanuel Dumont – 6e Dimanche du Temps ordinaire – 12 février 2023

Que votre oui soit oui, êtes-vous d’accord ?

Vous êtes d’accord ?

Dire oui ou non, c’est beaucoup plus que penser oui ou non, c’est donner à entendre sa pensé, c’est transformer un acte intérieur en acte extérieur, c’est lui donner chair : dire c’est incarner.

Quand nous disons « oui » ou « non », nous ne faisons donc pas n’importe quoi. Vous le saviez déjà, mais quand c’est le Christ qui nous le dit, quand c’est le Verbe incarné qui nous le dit, alors, c’est autre chose.

1.2        Gloire et morale

Hier, à la manifestation, il y avait des gens qui chantaient « pour l’honneur des travailleurs et pour un monde meilleur ». Cela me rappelait le répond à la messe « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ».

Je crois que c’est le sens profond du sermon sur la Montagne, que nous lisons sur plusieurs dimanches.

La gloire de Dieu, c’est ce que Dieu est. Et dans le sermon sur la Montagne, le Christ nous révèle la gloire du Verbe incarné. Et le salut du monde ou le monde meilleur, c’est ce que nous faisons ou ce que nous sommes appelés à faire.

1.3        La folie de la vie chrétienne

Certains ont surtout interprété spirituellement ces conseils de Jésus : pour Augustin, par exemple, l’autel dont parle Jésus, c’est le Christ lui-même, on ne peut se présenter devant le Christ, on ne peut prier si on est en conflit avec son frère. Pour Thomas, l’œil droit qu’il faut arracher, ce sont les mouvements intérieurs ou les conseils extérieurs. Il invite ainsi à se séparer de son conseiller spirituel si il nous entraine vers le mal. Un conseil que les frères Philippe n’ont probablement pas fait lire autour d’eux.

Certains ont pensé que ces conseils étaient faits pour une élite, pour les meilleurs d’entre nous. D’autres (tels que Schweitzer) ont pensé que ces conseils étaient typiques des conseils de la fin des temps, quand on n’a plus besoin d’être réaliste parce que la fin approche. D’autres enfin (tels que Luther) ont préféré ne pas trop en parlé parce qu’on n’y voit trop les œuvres et pas assez la grâce.

Le sermon sur la montagne avec la réconciliation, l’amour de l’ennemi et l’absence d’adultère en pensée peut nous sembler fou, mais ce n’est rien par rapport à la folie de la Résurrection du Christ.

Quand les premiers chrétiens ont pris conscience et on parlé de cette Résurrection du Christ, ils n’ont pas voulue parler de quelque chose d’extérieur, mais de quelque chose d’intérieur.

1.4        Un schéma à colorier

Les Béatitudes, et les petites paraboles du sel de la terre et du lampadaire, c’était l’introduction. Maintenant, on rentre dans le cœur du sermon : Jésus est venu accomplir la Loi et les prophètes… Et à la fin du sermon il dira que le résumé de la loi et les prophètes, c’est la règle d’or : que tout ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux. Et au milieu du sermon, on trouvera la prière du Notre Père, cette prière que prononçait le Christ lui-même et que nous faisons notre, intimement. Le sermon sur la montagne nous invite à intérioriser la vie du Christ.

Jésus nous parle bien de lui. C’est lui accomplit la loi et les prophètes. C’est lui qui réalise à la perfection la loi et qui remplit les promesses de la Torah et des prophètes. C’est-à-dire qui la remplie, qui l’incarne, qui lui donne forme, qui en révèle la vie. Il nous parle de lui qui aime ses ennemis, qui a le regard pur et qui vit pleinement la parole qu’il donne. C’est un sermon sur l’action de Dieu dans le monde. Mais Dieu n’agit pas sans nous, il nous entraine avec lui.

C’est comme si la loi et les prophètes étaient un schéma, des lignes directrices qui nous parlaient des promesses de Dieu et de la vie avec Dieu, et le Christ vient colorer le schéma, il vient remplir les promesses. Mais il ne nous laisse pas passif, il nous responsabilise, il nous invite à participer au coloriage.

Le chapitre 5 se poursuit avec le dépassement de la loi du talion et l’amour des ennemis pour finir sur cette formule : « soyez parfaits comme votre Père est parfait ». Ici, la perfection est exprimée par un mot grec qui indique le but. Orientons toute notre vie vers le seul qui mérite d’être notre but, vers Dieu.

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