Fête de sainte Catherine de Sienne

Lettre à frère Barthélémi Dominici de sainte Catherine de Sienne, o.p.

Au nom de Jésus-Christ crucifié et de la douce Marie. 

Très cher et très aimé fils dans le Christ Jésus, moi, Catherine, servante et esclave des serviteurs de Dieu, je vous bénis et vous encourage dans le précieux sang de Jésus-Christ. J’ai ardemment désiré faire cette pâque avec vous avant de mourir1.

Voici quelle est la pâque que je voudrais faire : nous voir à la table de l’Agneau immaculé, qui est à la fois la nourriture, la table et le serviteur. C’est sur cette table que se trouvent les fruits des vraies et solides vertus. Les autres tables n’en ont point, mais les fruits de celle-ci sont parfaits, car ils donnent la vie. Cette table est toute percée de veines qui répandent le sang ; parmi ces veines, il y a un canal qui verse du sang et de l’eau mêlés au feu. L’œil qui se fixe sur ce canal découvre le secret du cœur. Ce sang est un vin qui enivre l’âme et dont elle ne se rassasie jamais ; plus elle en boit, plus elle veut en boire, parce que le sang et la chair sont unis au Dieu infini. Ô mon très doux fils dans le Christ Jésus, courons avec zèle vers cette table, et accomplissez mon désir en vous, afin que je fasse la pâque, comme il est dit. Faites comme celui qui boit au point de s’enivrer et de s’oublier lui-même, et plus il prend plaisir à boire du vin, plus il en boit ; pendant ce temps, son estomac est si échauffé par le vin, qu’il ne peut le retenir et le vomit. Oui, mon fils, la table où nous trouverons ce vin, c’est le côté ouvert du Fils de Dieu. Son sang réchauffe et détruit toute faiblesse ; il rend claire la voix de celui qui le boit, il réjouit2 l’âme et le cœur, car ce sang a été répandu par le feu de la divine charité ; il réchauffe l’homme à tel point qu’il se rejette, et  qu’il ne se voit plus pour lui-même, mais pour Dieu, et qu’il voit Dieu pour Dieu, et le prochain pour Dieu. Sitôt qu’il a bu ce sang, il le répand sur la tête de ses frères, à l’exemple de Celui qui, sur cette table, le verse continuellement, non pour servir ses intérêts mais les nôtres. Nous qui mangeons à cette table, conformons-nous à cette nourriture et faisons de même, non pour servir nos intérêts, mais pour l’honneur de Dieu et le salut du prochain.

C’est pour cela que vous êtes envoyé ici. Courage donc, car ce feu vous rendra votre voix qui paraît bien enrouée.


1 Lc 22,1 2 Ps 103,15

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