Homélie du frère Nicolas Burle – Mardi 5 mai 2020

Un de mes amis m’a dit hier qu’il était très heureux d’avoir enfin le sentiment de vivre comme au Moyen-Âge puisque, comme au XIVe, nous avons deux papes et une épidémie. Qu’aurait dit saint Vincent Ferrier au sujet de la fin du monde ? La fin de ce monde tel que nous l’avons connu ? Qu’aurait-il prêché ? Je pense qu’il aurait prêché la confiance en Dieu pour les brebis et la conversion pour les pasteurs.

« Mes brebis écoutent ma voix : moi, je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main. »

Que les brebis soient sans crainte : la main de Dieu est leur enclos. La main de Dieu est leur rempart. Rien ne pourra nous séparer de l’amour du Père manifesté dans le Christ Jésus.

Mais les brebis ne tiennent dans la main du Père que parce qu’elles écoutent la voix du Seigneur. Sinon elles en tombent et elles se laissent dévorer par les loups.

Alors qui parlera aux brebis ? Qui leur annoncera la parole du Seigneur ? Comment les brebis pourraient-elles entendre la vérité si personne ne leur parle ?

Si les bergers n’ont plus la parole, ne prennent plus la parole, alors d’autres faux bergers parleront aux brebis.

C’est déjà le cas. C’est toujours le cas. Car la nature a horreur du vide.

Écoutons notre frère Vincent Ferrier : Je me suis aperçu que toutes ces erreurs, toutes ces hérésies où étaient plongés ces braves gens venaient principalement de l’absence de prédicateurs. Depuis trente ans, nul apôtre n’avait paru parmi eux, si ce n’est des hérétiques Vaudois deux fois par an. Aussi, vénérable Maître quelle responsabilité pèse sur les prélats et sur tous ceux qui, par office, sont obligés de prêcher ! Lesquels, hélas ! Préfèrent demeurer dans les grandes villes où ils ont de beaux appartements avec toutes leurs aises, pendant que périssent les âmes pour lesquelles Jésus Christ est mort. Elles meurent faute de pasteur spirituel ; il n’est là personne pour rompre le pain aux enfants ; la moisson est abondante mais il n’y a pas de moissonneurs. Je prie donc le Maître du champ d’envoyer des ouvriers.

Notre monde fait beaucoup de bruit. Mais ne cédons pas à la tentation de crier plus fort que lui pour nous faire entendre. La Parole de Dieu est plus subtile que cela. Avez-vous déjà écouté un orchestre philharmonique jouant à pleine puissance ? Comme dans la valse des fleurs de Tchaïkowsky ou la danse de la fée dragée. Je suis sûr que vous distinguiez alors parfaitement le triangle qui domine sans effort tous les instruments. Il n’y a pas besoin de crier fort pour que l’Évangile soit à nouveau entendu. Il nous suffit d’être plus subtils que les grosses caisses et les trompettes de la renommée.

C’est pourquoi nous allons prononcer maintenant les paroles de l’eucharistie. Les seules qui ont changé le cours de l’histoire.