Dieu, mes excuses et moi

Homélie du frère Raphaël de Bouillé – Dimanche de Pentecôte 23 mai 2021

Il y a, frères et sœurs, quelque chose d’étonnant dans cette fête de Pentecôte, où le Christ répand son Esprit sur son Eglise, pour lui donner sa sainteté, son élan et ses ministères. Vous l’avez peut-être remarqué, il y a à Jérusalem des juifs pieux de toute la terre connue, Parthes, Mèdes, Elamites, des crétois, arabes, romains, grecs. Ce sont des héros. Ces juifs avaient pour la plupart quatre mois de voyage aller-retour pour aller à Jérusalem : je vous invite à imaginer le trajet à pied, pour aller de l’Iran actuelle, la Grèce ou la Libye, et rejoindre Jérusalem. Ils sont partis avant Pâque, ils renteront fin juillet. Paul ou Barnabé, juifs de Tarse ou de Chypre, faisaient ce type de voyage, des voyages sans fin. 

La réalité aussi, c’est que très peu de personnes dans leur diaspora peuvent à la fois financer ce voyage et arrêter de travailler pendant 4 mois pour aller à Jérusalem. Il y a un revers à ce qu’ils soient des héros. Quand le lieu de la présence de Dieu, c’est Jérusalem, et que vous vivez en Iran actuel ou en Libye actuelle, vous avez une solide excuse pour ne pas vivre en présence de Dieu. Et les autres juifs, les païens proches des juifs de leur pays, ont une solide excuse pour ne pas vivre en présence de Dieu. 

Aujourd’hui, en cette fête de Pentecôte, Dieu change la nature de cette diaspora de juifs, le fait qu’ils soient loin, soient d’une autre culture, n’est plus un obstacle à leur sainteté, mais une opportunité pour manifester la sainteté de Dieu aux nations. Le lieu de la sainteté n’est plus le temple, mais l’accueil par la foi du Saint-Esprit de Dieu. 

Il y aurait beaucoup à dire, mais je veux m’arrêter aujourd’hui sur un seul point. En cette fête de Pentecôte, nous n’avons plus d’excuse à ne pas être saint, car il n’est pas nécessaire d’être un héro pour être saint. Être saint, c’est se laisser aimer par le Christ, se laisser transformer par cette amour, pour en rayonner autour de nous. Nous le reconnaissons par les fruits du Saint-Esprit en nous « Amour, joie paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur, maîtrise de soi ». 

Quelques soient les difficultés du moment, Dieu nous donne la grâce nécessaire pour ne pas avoir des excuses, mais des actes de foi, d’espérance et de charité. Vous avez sans doute déjà remarqué à quelle point des personnes de votre entourage peuvent riche de leurs excuses pour ne pas répondre à Dieu. Peut-être même savez-vous reconnaître vos propres excuses. 

Moi quand je vois un de mes frères poser un acte de charité et que j’ai du mal à l’imiter, j’utilise beaucoup devant Dieu : « oui, mais moi, c’est différent. » « C’est pas si simple. » « Si tu savais ce que j’ai vécu », « ma situation est tellement différente ». 

Sérieusement, au jour du jugement, quand j’arriverai devant Dieu avec mes valises d’excuses pour ne pas avoir accueilli la vie de l’Esprit en moi, laquelle de ces excuses va réellement convaincre le Seigneur ? 

Quand le Christ a rencontré Marie-Madeleine ou Zaché, ils avaient de solides excuses pour ne pas être saint. Sainte Rita était mal partie aussi. Plus proche de nous, il y a Jacques Fesch. 

Il y a objectivement des choses difficiles dans nos vies : des réalités physiques, comme des distances à parcourir, des circonstances terribles comme les crises actuels, des relations difficiles, des fragilités. Dieu ne nous demande pas de les ignorer, mais de les vivre dans la foi, dans une ferme espérance, dans une charité opportune. 

Dieu ne nous demande pas d’ignorer les difficultés, mais de faire confiance à la vie de l’Esprit en nous, et de ne pas transformer ces difficultés en excuses pour vivre une vie chrétienne de deuxième catégorie. 

Je pense à une femme qui a environ 50 ans aujourd’hui. Enfant, elle a perdu un membre de sa famille le jour de Pâques : elle a fait sa vie, fondé une famille, travaillé, et cheminer avec Dieu. Une de ses tristesses de vie, c’est d’avoir vu sa grande sœur s’enfermer dans cette excuse pour ne pas vivre vraiment sa vie. Elle a été la marraine de plusieurs filleuls, et l’un d’eux a eu lui aussi enfant une série de pépins de vie. Un jour, en voyant son visage, elle a reconnu le même visage que celui de sa grande sœur et tout de suite elle lui a dit : « t’as pas eu de chance parce “ça” et encore “ça” et puis “ceci”, mais ce ne sera jamais une excuse pour rater ta vie ».

Je prie pour que vous puissiez aujourd’hui être renouvelé dans la grâce de votre baptême, de votre confirmation, dans les engagements et sacrements que vous avez pris. Spécialement, en ce temps de Pentecôte, je vous propose de nommer des difficultés dont vous vous servez comme excuses pour ne pas laisser le Saint-Esprit s’exprimer en vous, pour ne pas poser des actes de foi, d’espérance et de charité et demander au Seigneur de vous en libérer. 

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